Philippe Lucas, la triste fin

Bien décidé à marcher dans les pas de sa sœur, Florent Manaudou aurait pu à son tour rejoindre Philippe Lucas alors qu’il n’était encore adolescent. Pourtant, malgré le titre conquis par Laure Manaudou à Athènes, celui qui n’était qu’un jeune garçon, déterminé à arrêter l’école pour se consacrer à la natation, a préféré refuser. « Je n’avais pas forcément envie d’aller avec Philippe, car c’est à la dure », a-t-il lancé, ajoutant: « C’est dur. C’est très dur. Mais ça ne dure pas longtemps. J’adore Philippe et ce qu’ils ont fait avec ma sœur, c’est quand même incroyable. Mais tu fais trois ans, quatre ans avec Philippe, après t’es rincé, a-t-il encore constaté. Tous les nageurs finissent à 25, 26 ans car ils ne sont pas heureux. »

Laure Manaudou en est sans doute la meilleure illustration. La native de Villeurbanne n’a en effet que 14 ans lorsqu’elle rejoint le groupe de Philippe Lucas à Melun. Trois années plus tard, elle devient championne olympique à Athènes en remportant le 400 mètres nage libre, offrant sa première médaille d’or à la natation française depuis plus d’un demi-siècle et montrant la voie aux autres nageurs tricolores.

Philippe Lucas trop dur pour Laure Manaudou

Trois ans après son sacre en Grèce, elle remporte pas moins de cinq médailles aux championnats du monde de Melbourne, dont les titres sur 400 mètres et 200 mètres nage libre, et est désignée meilleure nageuse de ces Mondiaux avec l’Américain Michael Phelps. Pourtant, deux moi plus tard, elle n’hésite pas à quitter Philippe Lucas pour partir s’entraîner en Italie afin de se rapprocher de son petit ami, le nageur transalpin Luca Marin. « Entre l’Italie et la France, je choisis Luca, l’amour de ma vie », confie-t-elle.

Quelques jours plus tard, elle explique dans la presse italienne qu’elle ne « supportait plus physiquement les entraînements » de Philippe Lucas. « Laure part parce qu’elle a envie de moins travailler. Elle fuit le travail », réplique l’entraîneur français. Le divorce entre les deux est consommée et lorsque la championne olympique, trois mois seulement après son départ fracassant vers l’Italie, elle rentre finalement en France pour s’entraîner, elle se tourne vers son grand frère Nicolas et son premier club d’ Ambérieu-en-Bugey plutôt que vers Philippe Lucas.

Regrets partagés

Laure Manaudou regrettera sa décision à l’issue de sa carrière. « J’aurais été plusieurs fois championne olympique, confie-t-elle peu après l’annonce de sa retraite, en 2013. C’est le meilleur sportivement et sur le plan relationnel ». « Si j’avais continué avec Philippe jusqu’à Pékin, j’en suis persuadée, j’aurais été plusieurs fois championne olympique. Dans ma tête, je ne pouvais pas continuer. C’est le moment où j’ai basculé entre l’ado et la femme », renchérit-elle deux ans plus tard.

Et les regrets sont partagés par l’entraîneur. « Je savais que sa relation avec Luca était dangereuse car un entraîneur peut tout gérer, sauf les histoires de mecs, se souvient Philippe Lucas. A ce moment-là, elle avait vingt ans, c’était son premier fiancé sérieux. Ce n’était pas un mec bien, je le savais, mais quand elle était amoureuse, c’était dur pour elle d’écouter», explique-t-il, ajoutant : « On peut penser que c’est du gâchis. » Malgré l’affection qu’il lui porte, Phillipe Lucas aura également des propos très durs contre sa nageuse.

« Sur trois Jeux Olympiques, elle en a fait un de bien. Le reste de sa carrière, c’est une catastrophe. Si t’analyses sa carrière, elle démarre en bombe. C’est la meilleure nageuse du monde. Après, derrière, c’est compliqué », n’hésite-t-il pas à lancer, amer.