True crime version Magic Mike ou l’inverse, Welcome to Chippendales met à nu l’histoire (vraie ou presque) du célèbre club de strip-teasers.
C’est quoi, Welcome to Chippendales ? Immigré indien employé dans une station service, Somen « Steve » Banerjee (Kumail Nanjiani) est parvenu, à force de sacrifices, à économiser suffisamment d’argent pour ouvrir à Los Angeles une salle de backgammon – qui n’a aucun succès. Jusqu’à ce qu’il ait l’idée, inédite à l’époque, de transformer son établissement en club de strip-tease pour femmes. Il engage des danseurs, recrute le chorégraphe Nick De Noia (Murray Bartlett) et dès l’ouverture en 1979, le Chippendales fait un triomphe. Le club ne désemplit pas, des mecs se trémoussent devant des femmes hystériques qui glissent des tonnes de billets dans leurs strings, la costumière Denise ( Juliette Lewis) a des idées géniales et Steve épouse même la comptable du club Irene (Annaleigh Ashford). Une success story qui va tourner court. Sexe, drogues, racisme, incendie volontaire et meurtre : Welcome to Chippendales !
Décidément, Robert Siegel a une prédilection pour les histoires sulfureuses. Après Pam et Tommy consacrée au scandale de la sex tape de Pamela Anderson, le showrunner s’intéresse aux dessous (et pas seulement aux strings) des Chippendales et au parcours tumultueux et même criminel du créateur du club, Somen « Steve » Banerjee.
S’accordant de nombreuses libertés par rapport aux faits, Welcome to Chippendales est un mélange de true crime, de frivolité et de drama. Si vous ne connaissez pas la véritable histoire de Steve Banerjee, si vous pensez que les Chippendales se résument à des danseurs à moitié nus qui excitent un public féminin, attendez vous à être surpris voire choqués. La meilleure manière de résumer la série consiste sans doute à citer un tweet de l’acteur principal et co-producteur Kumail Nanjiani : « Meurtre ! Complot ! Incendie criminel ! Strings ! Encore des meurtres ! Des tentatives de meurtres ! » Et ça, c’est du teaser !
L’histoire est à peine croyable, mais la série l’exploite de manière très classique avec une mise en scène et une construction chronologique un peu plan-plan. Le dernier épisode est aussi un peu décevant – plus court, il précipite la conclusion et n’est pas au niveau du reste. Malgré tout, avec ses huit épisodes d’environ 45 minutes et qui s’achèvent sur de bons cliffhanger, Welcome to Chippendales joue sur une ambiance où la noirceur couve sous les paillettes et où la tension et le drama montent en puissance. Si la tragédie explose dès la fin du premier épisode, c’est surtout dans le troisième que le récit s’accélère, la trajectoire des personnages devenant incontrôlable, inexorable et imprévisible (pour qui ne connaît pas les faits).
La série bénéficie d’une bonne reconstitution de l’époque. On est tout de suite plongé dans le Los Angeles des années 1980, tant en termes d’ambiance que de réalisation. Générique vintage, patine de l’image, mise en scène familière… mais aussi et surtout les décors, les tenues, les coiffures, le maquillage et la musique. La bande-son est d’ailleurs jubilatoire, la série alignant les tubes de Queen, Abba ou encore Blondie. Et dans cette période qui suit directement la libération sexuelle de la décennie précédente, le contexte est aussi celui d’une levée des tabous et de l’émancipation féminine… par le biais du strip-tease masculin. Girls just wanna have fun et, comme l’explique le personnage joué par Juliette Lewis dans un épisode, elles veulent prendre le contrôle de leur sexualité en renversant la dynamique du pouvoir. C’est une des raisons pour lesquelles l’idée des strip-teasers mâles fonctionne : c’est une forme d’exploitation des fantasmes féminins, les clientes pouvant regarder (et toucher) des hommes musclés qui se déshabillent au rythme de la musique dans un lieu réservé rien que pour elles.
Le fait divers en lui-même est choquant, empreint de soufre et de scandale, mais dit aussi quelque chose en termes de thèmes de société. Immigré indien récemment installé à Los Angeles, Banerjee est un homme dévoré par l’ambition, qui vit le racisme au quotidien mais qui refuse l’entrée du club aux Noirs et écarte son seul danseur afro-américain du calendrier des Chippendales, il se rêve en Hugh Hefner, adore rencontrer des célébrités même s’il ne sait pas qui elles sont, cherche à faire fortune pour obtenir une sorte de revanche sociale et l’approbation de sa famille restée en Inde. Une famille qui, justement, est horrifiée par la nature de son entreprise. Mais les autres personnages ne sont pas forcément plus recommandables, à l’instar de De Noia (formidable Murray Bartlett), sournois et manipulateur, prêt à tout pour attirer sur lui la lumière des projecteurs… et les millions de dollars générés par les spectacles de Chippendales.
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Si vous regardez Disney+ pour des gars qui se trémoussent en slips, vous allez être servi(e)s : il y a de nombreuses scènes de spectacles, de chorégraphies hot, de paires de fesses masculines musclées. Mais ce n’est pas l’essentiel. Le vrai sujet de la série, c’est le parcours criminel du créateur du club, ce fameux Steve Banerjee. Interprété par un excellent Kumail Nanjiani, le personnage a d’abord des airs presque comiques, il semble pathétique et ridicule. Mais en réalité, ce type n’est pas drôle du tout. Control freak sournois et sans scrupules, il est capable de tout pour réaliser un American dream… qui va tourner au cauchemar. De petites mesquineries et petites jalousies jusqu’à l’incendie volontaire d’un club rival, le meurtre d’un associé puis d’autres tentatives de meurtres, c’est une descente aux enfers, une sorte de Breaking Bad à paillettes et strings. Jusqu’à la fin – qu’on ne dévoilera évidemment pas.
Strings, paillettes… procès, tragédies et meurtres. Derrière l’esquisse scintillante du club des stripteasers, et malgré une approche sans surprise, Welcome to Chippendales surprend en racontant un fait divers sordide. True crime drama et portrait d’un homme qui détruit sa vie à cause de son ambition dévorante, voilà un American crime story qui aurait pu inspirer Ryan Murphy.
Welcome to Chippendales
8 épisodes de 36′ à 48′ minutes.
Disponible sur Disney+.
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