Tadej Pogacar a survolé le Tour de Lombardie samedi, et le pire dans tout cela, c’est que tout était absolument prévu. Avant le départ, tout le peloton savait que le Slovène allait décoller dans les pentes du col de Sormano, la principale difficulté du jour, et tout le monde était convaincu que le récent champion du monde allait signer un nouveau raid solitaire de près de 50 kilomètres.
Encore une fois, le roi « Pogi » était largement au-dessus de la concurrence, et cette nouvelle démonstration, aussi clinquante qu’attendu, a estomaqué les commentateurs d’Eurosport pendant le direct. « Ce qui étonne, c’est pas qu’il gagne, mais qu’il soit au-dessus des autres avec un tel écart », a confié Guillaume Di Grazia, une dizaine de minutes avant l’arrivée.
Pogacar, comment l’expliquer ?
Le commentateur a évoqué les fameux « gains marginaux », popularisés par la Sky de Christopher Froome et repris par la Visma de Jonas Vingegaard, mais ceux-ci sont censés provoquer des « différences infimes ». Pogacar, lui propose un niveau de performance « 10 à 15% » supérieur à ses adversaires, ce que Di Grazia compare à un écart d’une seconde sur 100 mètres en athlétisme, où tout se joue plutôt à coup de centièmes.
« Là, il y a 2’36 sur Remco Evenepoel », observe le commentateur, alors que Philippe Gilbert craignait des écarts terribles (« le dixième va être 10 minutes »). Le dixième finira finalement à moins de cinq minutes, ce qui est déjà colossal, mais Evenepoel, l’un des coureurs les plus fort de sa génération, finira bien à plus de 3 minutes. Un écart qui n’avait plus été vu depuis 1971 et une victoire d’Eddy Merckx, le seul point de comparaison qui tienne encore avec ce Pogacar. Et encore…
« On est dans des proportions merckxiennes, reprend Di Grazia, et le cyclisme n’était pas aussi compact qu’aujourd’hui à l’époque d’Eddy Merckx ou de Bernard Hinault. » Le commentateur évoque alors l’absence des Soviétiques dans ces années-là, et l’émergence de certains nouveaux pays de cyclisme comme l’Australie, la Grande-Bretagne… ou la Slovénie.
« Le cyclisme est devenu plus global, le niveau moyen est plus haut et lui il explose ce niveau moyen plus haut avec de plus grandes différences, c’est ça qui peut paraître choquant », conclut Di Grazia. « Si vous avez une explication…« , demande le commentateur, qui ne veut pas ouvertement aller sur le terrain du dopage. « Nous, à part celle du talent… »