20 ans après la mort d’une dizaine de français au Pakistan, à Karachi plus précisément, l’attentat visant des employés de la Direction des Constructions Navale (DCN) reste un mystère qui a mené à une affaire politico-financière française.
Le 8 mai 2002, alors que le Gouvernement de Jean-Pierre Raffarin prend ses fonctions, un attentat survient à Karachi, au Pakistan. Il est presque 8 h du matin lorsqu’une voiture piégée fonce sur un bus. À son bord : 25 personnes dont 23 ouvriers français de la DCN. Les employés se rendaient sur le chantier des sous-marins Agosta 90B vendus par la France.
Des français pour cible
C’est la stupeur dans le nord-ouest de la France en ce 8 mai 2002, la plupart des victimes étant originaires de Cherbourg-en-Cotentin. Les employés français étaient dans la capitale économique du Pakistan pour apporter leur aide technique à la construction de l’Agosta 90B : le dernier des trois sous-marins à propulsion classique vendus au Pakistan dans un contrat datant de 1994.
N’étant pas tous logés au même hôtel, un bus militaire récupère les ouvriers de la DCN. C’est alors que devant l’hôtel Sheraton, au moment où cinq personnes embarquent dans le bus, un individu colle son véhicule rempli d’explosifs (un mélange d’explosifs militaires puissants) contre ce dernier et fait tout exploser. De plus, l’explosion d’une mine magnétique placée sur l’autobus avait sans doute été déclenchée à distance.
Le bilan est lourd : 14 morts (dont 11 français) et 12 blessés.
Un acte pas anodin
Oussama Ben Laden ayant salué le geste, l’attentat fut attribué à Al-Qaïda jusqu’en juin 2009. Une centaine d’individus du milieu islamistes avait été arrêté au lendemain de l’attentat. Tous seront relâchés. Trois suspects sont arrêtés en décembre 2002 et condamnés à mort avant d’être acquittés par la justice pakistanaise après que cette dernière ait écarté la piste islamiste. 10 ans après les faits, l’enquête n’est toujours pas conclue.
Les juges français chargés de l’affaire privilégient l’hypothèse de représailles à l’encontre de la France. Mais là encore rien n’est sûr.
L’attentat devient une affaire d’État
Entre octobre 2009 et mars 2010, une mission d’information de l’Assemblée nationale examine les circonstances entourant l’attentat sous l’impulsion de Bernard Cazeneuve. Des débats et des auditions seront menés pendant des mois qui permettront d’aboutir à une hypothèse : une affaire politico-financière française.
En effet, l’attentat aurait pu être commis en représailles à l’arrêt de versement de commissions promises à des intermédiaires pakistanais. Depuis le début, le contrat d’armement franco-pakistanais donne lieu à des soupçons de corruption. Une affaire qui se complique également avec la possible existence d’un retour frauduleux d’une partie de l’argent en France, ce qu’on appelle des « rétrocommissions ». Plusieurs noms sortent comme Édouard Balladur, Charles Millon ou encore François Léotard. Ce dernier sera d’ailleurs, le 4 mars 2021, condamné par la Cour de justice de la République (CJR), la seule habilitée à juger des ministres dans l’exercice de leurs fonctions, à de la prison avec sursis et une amende de 100 000 € pour abus de biens sociaux.
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