Les faits historiques passent définitivement à la trappe dans cette deuxième saison de The Great, encore plus folle et jubilatoire.
C’est quoi, The great (saison 2) ? Le coup d’état de Catherine (Elle Fanning) contre son mari Pierre III (Nicholas Hoult) ne s’est pas déroulé comme prévu. Désormais, le palais est divisé en deux : les partisans de Catherine d’un côté, Pierre et les nobles réfugiés dans leurs appartements. Si Catherine s’empare finalement du pouvoir, elle n’est pas au bout de ses peines. Entre sa grossesse qui exacerbe sa libido, le double jeu de la tante Elisabeth (Belinda Bromilox), la visite impromptue de sa mère Joanna (Gillian Anderson), la trahison de Marial (Phoebe Fox) et ses rapports ambigus avec Pierre, le règne s’annonce compliqué. A fortiori lorsque la jeune impératrice voit ses idées progressistes et ses ambitions se heurter à la réalité.
Avec la première saison, on avait bien compris que l’exactitude historique était le cadet des soucis de The great : la vie et l’œuvre de Catherine, future impératrice de Russie, n’était qu’un prétexte pour raconter une histoire délurée et délirante. La série n’en faisait pas mystère avec son générique annonçant une « histoire parfois vraie » , et la deuxième saison, disponible sur Starzplay, enfonce le clou en modifiant son sous-titre dans le dernier épisode : il s’agit désormais d’une « histoire presque entièrement fausse ». C’est dit : The Great fait ce qu’elle veut, se moque totalement de la vérité ou même de la vraisemblance historique, huzzah et advienne que pourra. Il faut donc l’accepter et aborder The great comme une pure fantaisie.
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La saison précédente s’achevait sur la tentative de coup d’état de Catherine contre Pierre. Soutenue par Orlov (Sacha Dhawan) et le général Velementov (Douglas Hodge), la jeune femme renonçait toutefois à tuer son mari. Désormais, la situation est aussi insolite que bloquée. Voulant épargner le plus de vies possible, Catherine tente vainement de déloger Pierre de l’aile du palais où il s’est enfermé avec les nobles. De son côté, Pierre envisage vaguement de récupérer son trône, entre deux orgies débridées. Quelques cocktails Molotov et un porc grillé plus tard (si, si), Catherine prend enfin le pouvoir. Son règne peut commencer.
Catherine la Grande entend justement faire de grandes choses : abolir le servage, promouvoir les idées des Lumières, faire la paix avec les ennemis de la Russie. Sauf que ce n’est pas si simple : l’empire ottoman profite du chaos pour empiéter sur la frontière commune et Velementov pousse pour une intervention armée ; l’ambassadeur turc refuse de négocier avec une femme ; la majorité des nobles ont pris le parti de Pierre ; Catherine se heurte à Archie (Adam Godley) qui mène d’une main de fer l’Église orthodoxe ; rares sont ceux qui adhèrent à ses idées farfelues comme l’éducation des filles (pourquoi faire ?), l’abolition du servage (une aberration) ou promouvoir les œuvres de Voltaire (présent à la cour, celui-ci passe son temps à trousser tout ce qui porte robe.) En outre, enceinte jusqu’aux yeux, Catherine voit sa libido monter en flèche et… prend langue avec son mari pour la satisfaire. Au propre et au figuré.
On le répète : regarder The Great pour se documenter sur le règne de Catherine II de Russie, c’est un peu comme se renseigner sur la légende arthurienne devant Kaamelott. Les rares éléments pertinents (il y en a) sont noyés dans le n’importe quoi – mais la démarche est totalement assumée et même jubilatoire, avec un humour débridé, absurde ou trivial, et des situations délirantes. Un crocodile qui terrorise le palais est instrumentalisé par les opposants de Catherine comme un avertissement divin ; Pierre collectionne les sosies qui se font dézinguer à sa place quand il tente de quitter son lieu de détention ; le médecin du palais doit s’adapter aux rites traditionnels russes (une grenouille posée sur le ventre de la future mère)… et on pourrait continuer longtemps. On ne peut pas retenir des éclats de rire, le ridicule et l’outrance poussés à l’extrême créant une ambiance folle souvent irrésistible.
Mine de rien, The Great aborde aussi des sujets moins anecdotiques qu’il n’y paraît, en confrontant les idéaux philosophiques et humanistes de son héroïne à la réalité socio-politique et aux limites de son pouvoir. Outre l’hostilité des nobles, Catherine comprend que son projet de réformer la Russie ne sera pas simple à mettre en œuvre. Comment prôner la liberté de culte quand le peuple suit aveuglément les directives de l’Église ? Éduquer les filles quand leurs familles cherchent avant tout à en faire de bons partis en vue de les marier ? Négocier la paix avec des pays ennemis qui voient la diplomatie comme une faiblesse ? Abolir le servage, qui est l’un des fondements de toute l’économie russe ? Promouvoir la liberté de la presse quand les opposants s’en emparent pour diffuser de fausses informations ?
Toutefois, le plus surprenant dans The Great reste cette capacité à nous lancer en pleine tête des scènes extrêmement émouvantes sans crier gare, de nous faire passer du rire aux larmes. On pense au final du sixième épisode, à un secret concernant Élisabeth, aux rapports de Catherine avec sa mère… ou au face à face final entre Catherine et Pierre, qui permet aux deux acteurs de briller. Tout au long de la saison, Elle Fanning est délicieuse, touchante et pétillante ; Nicolas Hoult est exceptionnel car capable de se montrer charmant, drôle et terrifiant dans la même scène. Et le dénouement, bien que prévisible, est indéniablement un moment très fort, qui indique en plus la direction que prendrait une éventuelle troisième saison.
Avec cette deuxième saison, The Great bascule définitivement dans la fantaisie délirante : c’est le Marie Antoinette de Sofia Coppola sous acide, Dickinson à la cour de Russie. C’est la spécialiste de la Russie Hélène Carrère d’Encausse qu’on assassine – mais c’est tellement extravagant que ça en est délicieux.Comme dirait Boney M : Oh, those Russians…
The great
Saison 2 – 10 épisodes de 50′ environ.
Disponible le 19 Décembre sur Starzplay.
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