Nouvelle série sur France 2 au cadre plus inhabituel mais aux enjeux tout aussi forts : Piste Noire avec Constance Labbé et Thibault de Montalembert.
C’est quoi Piste Noire ? Les Alpes, majestueuses, la neige immaculée. Un skieur dévale les pentes, défiant la gravité, flirtant avec ses limites. Il fonce dans l’immensité blanche. A l’Isba, le plus bel hôtel de la station des Clairies, on fête la victoire de Boris, le champion de descente, enfant chéri du pays. Au pied de la station, dans un campement de fortune, une caravane brûle, enfermant dans ses flammes un saisonnier mal logé. Emilie, jeune gendarme de la SR de Lyon, va mener l’enquête dans les coulisses meurtrières d’une station de ski où elle a passé sa jeunesse.
L’essentiel
Prenant place dans le cadre majestueux des Alpes prises dans la neige, cette nouvelle série de 6 x 52 minutes nous vient tout droit de Charline de Lépine (productrice des Hommes de l’ombre), sous la réalisation de Fred Grivois (Trauma) et bien entendu écrite par Jennifer Have, Anne Peyrègne, Robin Barataud, Pierre Delorme, Monica Rattazi, Sylvain Saada. Une belle distribution d’auteurs mais sans un nom pour « chapeauter » l’ensemble, difficile de dégager un style dans l’écriture, c’est alors celle du réalisateur qui semble davantage se dégager on y reviendra. Portée par une belle distribution, Piste Noire est l’occasion de voir Constance Labbé porter une série et on ne peut que constater qu’elle n’a aucun mal à s’imposer et en imposer auprès de ses autres partenaires de jeu, Thibault de Montalembert, Hélène Seuzaret, Pierre-Yves Bon, Déborah Krey, Christiane Millet, Christian Rauth, Solène Rigot, Dimitri Storoge, …
On aime
Une nouvelle fois avec Piste Noire, Fred Grivois prouve qu’il est un réalisateur qui a un style vraiment singulier, donnant à chacune de ses séries une identité particulière. Ici la station où prend place la série se pare de ses plus habits et il nous donne le sentiment d’être dans une ambiance à la Stephen King ( plus que dans le type d’histoire qui nous est raconté ici). Le décalage est très fort, trop fort. De même si Grivois, véritable chef d’orchestre du rythme de la série, abuse parfois un peu des effets visuels (comme les ralentis) mais on ne boudera pas son plaisir : la patine de la série, sa photographie, tout est absolument somptueux et confère à la série une aura qui lui est propre. Pour compléter cette réalisation soignée et cette photographie pleinement réussie, il faut ajouter la bande son juste incroyable de Thomas Cappeau, un de nos très bons compositeurs de musiques de film, habitué au projet de genre différent. Outre Trauma et L’invitation où il avait travaillé avec Fred Grivois, on lui doit aussi les musiques de T.A.N.K et surtout l’incroyable bande son très stylisée de Lazy Company. Tant la réalisation que la musique, on a la sensation que tout est fait dans cette série pour nous extraire d’un environnement « français » pour plus nous plonger dans un univers « anglo-saxon », comme ce fut le cas dans le passé avec Les revenants ou Zone Blanche.
L’autre grande réussite de cette série est son casting. Il faut reconnaître que les petits plats ont été mis dans les grands pour accueillir une distribution vraiment soignée, en premier lieu Constance Labbé qui confirme son statut de comédienne capable de porter en « lead » des séries télé (même s’il faudra que les auteurs fassent preuve d’imagination et lui propose autre chose que des rôles de flics). A ses cotés, Thibault de Montalembert campe un flic étonnant, sombre, canalisant ses émotions, mais les laissant passer à des moments opportuns et qui trouve véritablement ici toute sa place, essentiellement dans la seconde partie de la série. Mention spéciale aussi au couple parfaitement incarné par les excellents Christian Rauth et Christiane Millet. La dureté de cet homme qui a rejeté sa fille ne faiblit jamais jusqu’à un final redoutable ! Enfin, notons la présence d’une très belle découverte, Solène Rigot, en activiste écolo qui prend tous les risques et qui se révèle charismatique au possible.
Enfin soulignons que la série se permet plusieurs paris bienvenus dans le déroulé de son histoire. En premier lieu, il n’est pas si fréquent de voir une héroïne lesbienne porter une série en prime time en France, une héroïne qui le dit, l’assume et le montre. Si les feuilletons quotidiens sont des habitués, c’est plus rare en prime et ça fait du bien.
de même, la série se paye aussi le risque de brouiller les cartes sur ce qu’elle est vraiment – un polar ? une série chorale ? un drama ? – comme pour mieux surprendre continuellement le spectateur. Mais on verra qu’à force de vouloir brouiller les cartes, on brouille un peu son message.
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On aime moins
C’est un paradoxe pour une série portée par deux héros policiers mais le polar est en trop dans cette histoire. Il y a de quoi raconter dans cette série la vie de cette communauté, l’influence que l’argent , les rivalités et les enjeux de pouvoir ont sur elle ; les doutes et les errances de l’enfant chéri de la station, souffrant autant du corps que de l’âme ; la fille prodigue rejetée par les siens et qui revient chez elle avec le poids du passé sur les épaules. Tous ces éléments, mis bout à bout dans la cocotte minute de cette station enclavée, prise dans la neige, et qui ne demande qu’à exploser, auraient pu mener au même final bouleversant et étonnant sans passer nécessairement pas une case polar qui semble malheureusement de plus en plus inévitable. Prenons le risque de faire du vrai drama, de s’intéresser aux personnages, passionnants dans cette série. Le polar n’est qu’un maillon de la grande histoire de cette série et phagocyte l’attention au détriment des personnages. La même histoire, sans la partie « polar » aurait pu être racontée et cela aurait même renforcé l’atmosphère pesant qui règne, où le drame familiale côtoie l’histoire de promoteurs véreux et mafieux. Alors oui les amateurs de polar y trouveront leur compte car l’histoire se suit bien, mais elle semble trop s’étirer en longueur là où l’histoire personnelle des personnages monte constamment et ne faiblit pas.
Piste Noire
6 x 52 minutes
Dès le 23 janvier sur France 2
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