Présentée à Séries Mania, la série Polar Park avec Jean-Paul Rouve et Guillaume Gouix est une petite pépite dont on savoure chaque moment avec délectation.
C’est quoi Polar Park ? Rousseau, un écrivain en panne d’inspiration, revient à Mouthe pour percer le secret de sa naissance. Parallèlement, la gendarmerie recherche un assassin passionné d’œuvres d’art. Rousseau va aider l’adjudant Louvetot à pénétrer l’esprit créatif du serial killer qui reproduit en vrai les plus grands tableaux.
Ecrit et réalisé par Gérald Hustache-Mathieu, Polar Park (du nom d’un parc animalier situé en Norvège) d’après les personnages créés en 2011 dans le film Poupoupidou, se glisse dans les pas dans polars noirs nordiques en leur donnant une touche décalée nécessaire pour accrocher le spectateur. L’hommage aux histoires de privés américains façon Philip Marlowe est évident par l’ajout de la voix off, le héros Rousseau se prenant lui-même pour le héros d’un de ses romans qui lorgnent clairement de leurs côtés dans le style et l’esprit. Avec sa touche décalée, Polar Park rappelle un peu le film Les cadavres ne portent pas de costards (sorti en 1982 avec Steve Martin). Tenant la route sur l’ensemble des 6 épisodes, Polar Park est une totale réussite. Le personnage de Rousseau colle à merveille à Jean-Paul Rouve, secondé par une distribution aux petits oignons, à commencer Soliane Moisset, qui n’est pas sans nous rappeler Julee Cruise, l’interprète du générique de Twin Peaks, en chanteuse du club de la ville qui pose sa voix sur la musique du générique (sur des paroles du réalisateur et auteur de la série himself). Mais c’est bien toute la BO de Stéphane Lopez qui est un petit bijou, rappelant les plus belles partitions de Badalementi, le compositeur culte de la série de Frost et Lynch.
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Au petit jeu des comparaisons, Polar Park se pose comme un hommage brillant et réussi à la série de Lynch et Frost, et ce à tous les niveaux. On y retrouve l’esprit évident de la petite ville “où l’on croise tout le monde” et où tout le monde se connaît, frappée par le “Mal”, à savoir des crimes odieux (la partie polar est particulièrement soignée et digne des meilleurs romans policiers dans la typologie du serial killer). On peut aussi évidemment penser à Fargo des frères Cohen auxquels le réalisateur emprunte beaucoup tout en ayant parfaitement digéré ces hommages. La série compte aussi son lot de personnages totalement décalée, parfois hors sol même, à commencer par le second de Louvetot (Guillaume Bouix) qui nous rappelle Andy dans Twin Peaks. Côté photographie, là aussi grosse réussite avec un soin particulier apporté tant aux plans parfaitement choisis, qu’à la lumière qui se pose sur la ville et ses décors, (du motel, de la morgue ou encore des grandes étendues, filmées comme si on était dans les paysages de l’ouest américain que la série convoque comme grand référant).
Mais en osant plus que de de raison et en assumant des choix radicaux, Polar Park n’hésite pas à bousculer sa propre mécanique et à prendre le spectateur “au piège”. Ainsi l’épisode 4 se termine sur la divulgation du ou de la coupable, pour mieux nous offrir ensuite un épisode concept qui réécrit toute l’histoire sous un jour nouveau. Pensé de l’aveu même du réalisateur comme “une adaptation des romans de Rousseau”, Polar Park surfe en permanence sur une ligne de crête déroutante où l’absurde ne l’emporte jamais sur la puissance de l’intrigue et l’aspect ultra référencé de la série. Les codes du genre ont été parfaitement compris et intégré avec le plus grand respect qui témoigne d’un vrai amour de la série et pas d’une simple “opportunité” comme on en voit beaucoup trop aujourd’hui. Si on regrettera que certains aspects de l’histoire soit un peu vite expédié dans le dernier épisode, la série est simplement maîtrisée de bout en bout. Le dernier plan où tous les personnages sont réunis ensemble dans le bar de la ville rappelle les séquences de fin de bien des séries passées. Mais quand le générique de fin retentit, et avec un dernier “twist”, on se dit que l’on ne veut pas en finir aussi vite avec Rousseau et Louvetot.
Et on se prend déjà à regretter que la série n’ait pas de possibilité de perdurer sur de possibles saisons à venir, Arte ne renouvelant pas ses fictions. Passer plus au second plan après De Grâce et Sous contrôle (primées au Festival), Polar Park est pourtant une superbe découverte et une véritable proposition visuelle, formelle et scénaristique.
Polar Park
6×52 minutes
Les 2 et 9 novembre sur Arte
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