Une victoire en solitaire du grand favori, avec une, deux ou parfois trois minutes d’avance. Cette saison, la campagne de Classiques a été marquée par l’extrême domination de deux hommes sur les Monuments. Mathieu van der Poel, qui a signé le doublé Tour des Flandres-Paris Roubaix, et Tadej Pogacar, qui a remporté Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie (en plus du Tour d’Italie, du Tour de France et des championnats du monde, excusez du peu).
Finalement, c’est Milan-San Remo qui aura proposé le plus de suspense. Mais les deux ogres n’y sont pas pour rien: c’est notamment parce que Van der Poel a neutralisé l’attaque de Pogacar dans le Poggio que son coéquipier Jasper Philipsen a pu l’emporter au sprint sur la Via Roma. Par leur puissance physique, et aussi la malchance de leurs rivaux (les chutes au printemps de Wout van Aert et Remco Evenepoel, par exemple), le Néerlandais et le Slovène ont eu droit de vie ou de mort sur les Monuments. Faut-il s’en réjouir, apprécier l’œuvre de deux coureurs au sommet de leur art, ou regretter le manque de suspense de ces courses d’un jour ? Philippe Gilbert a son avis sur la question.
« Elle a vraiment été exceptionnelle, confie le Belge dans L’Equipe au sujet de la campagne de classiques. Par la qualité des vainqueurs, ce qui n’est pas une surprise, mais aussi par la manière dont les classiques et le Mondial ont été gagnés. Je pense à Paris-Roubaix, où Mathieu (Van der Poel) part en costaud et gère ses efforts avec justesse, à Tadej (Pogacar) qui attaque dans la Redoute pour aller gagner son deuxième Liège-Bastogne. »
Van der Poel et de Pogacar, des champions du monde à l’attaque
« Tout ça m’a impressionné et m’a énormément plu, ajoute celui qui avait écrasé les Ardennaises en 2011. Ça a vraiment été un grand cru cette année, on peut même parler d’un cyclisme total. On voit une immense évolution avec cette génération de coureurs offensifs, qui partent de loin avec la certitude de gagner. J’ai arrêté il y a seulement deux ans et c’est déjà un autre monde. Évidemment, on pourra toujours se demander si c’est bien ou pas d’avoir des coureurs qui écrasent la concurrence comme ça, mais quand on domine à ce point-là… »
En tant qu’ancien champion du monde, Gilbert a aimé voir Van der Poel puis Pogacar faire honneur au maillot arc-en-ciel en se comportant en patron sur ces classiques mythiques. Les raids solitaires des ogres lui ont plu, et sa course préférée de la saison en est le parfait exemple: « Les Strade Bianche, car c’était la première. On était en début de saison, on ne savait pas qui allait dominer et, là, Pogacar attaque à plus de 80 kilomètres de l’arrivée. Il a écrasé la course mais, derrière, on avait aussi eu une sacrée bagarre. C’est pour ça que c’est la classique la plus belle de la saison, à mon avis, car elle annonçait aussi la suite. » Effectivement.