Les derniers projets de Mohammed ben Salmane sont destinés à sortir son royaume de l’or noir pour diversifier son économie et construire un avenir visionnaire
La “New Muraba”, dernière folie du prince Salmane
En février dernier, on découvrait le dernier projet titanesque du prince héritier d’Arabie saoudite : la « New Murabba », une nouvelle entité urbaine qui devrait permettre à la population de Riyad, estimée à près de 8 millions d’habitants aujourd’hui, de doubler. Au programme, les architectes du royaume prévoient la construction de 25 millions de km² de surface de plancher, 104 000 unités résidentielles, 9 000 chambres d’hôtel, 980 000 m² d’espaces commerciaux, 1,4 million de m² de bureaux, 620 000 m² d’actifs de loisirs et 1,8 million de m² d’installations communautaires.
Au centre de ce projet faramineux au coeur de Riyad se hissera la pièce maitresse : le “Mukaab”. Cet édifice fait indéniablement penser à la Kaaba, lieu le plus sacré de l’islam, situé dans la ville sainte de la Mecque. D’après la presse américaine, ce cube géant qui mesurera 400m de large, de haut et de long, promet de faire 20 fois la taille de l’Empire State Building. Au sein de ce cube tout sera fait en sorte pour qu’il n’y ait nul besoin d’en sortir. On y trouvera notamment deux millions de mètres carrés de boutiques, d’attractions culturelles et touristiques. L’Etat n’hésite pas à exagérer en insérant des dragons et des vaisseaux dans la vidéo de promotion de ce cube gargantuesque. Enfin, la « New Murabba » s’inscrit dans le cadre du plan Saudi Vision 2030 et rejoint le précédent projet urbaniste “Neom”.
“Neom”, entre démesure et controverse
Sur les bords de la mer Rouge, aux confins de la Jordanie et de l’Egypte, dans la province de Tabuk, sera construit Neom. Ce projet urbain pharaonique se décrit comme un “accélérateur de progrès humain”. Il est une réponse à la Silicon Valley, se divisera en quatre lieux : Sindalah, Oxagon, Trojena et The Line. D’une superficie totale de 26 000 m2, Neom a pour but de forger à MBS une image de leader arabe, bâtisseur et visionnaire. En plein désert, se dévoileront quatre lieux florissants, modernes et organisés grâce à l’intelligence artificielle. Avec des taxis volants, des livraisons par drones, des parcs éoliens et une agriculture verticale, Neom a de quoi épater. Le prince héritier assure d’ailleurs que ce projet sera éco-responsable et une fois construit, ne dépendra que d’énergies renouvelables.
Ces villes qui s’inscrivent dans la vision d’avenir de MBS, “Saudi Vision 2030 “, seront quatre : Trojena, qui culminera à 2000m d’altitude, désignée pour organiser les jeux asiatiques d’hiver 2029. Deuxièmement, Sindalah est un projet d’îles artificielles de luxe destinée à faire venir encore plus de touristes. Mais aussi Oxagon, un projet de ville flottante en forme d’octogone. Enfin, certainement la ville la plus futuriste de prime abord, il s’agit de The Line, une ligne de deux gratte-ciel face à face, recouverts de miroirs au sein desquels s’érigera une ville pleine d’innovations.
Ce chantier gigantesque et la promesse de villes sans émission est une calomnie selon de nombreux géologues, urbanistes et experts qui y voient d’immenses coûts en matières fossiles et humaines. De plus, le projet aurait le coût exorbitant de 500 milliards d’euros, des investisseurs étrangers, notamment américains et arabes participeront à priori au financement. Tandis que Riyad mettra en bourse 5 % d’Aramco, la compagnie nationale saoudienne d’hydrocarbures, pour subvenir au coût de construction.
Révolutionner son pays
L’objectif du prince Mohammed ben Salmane est de diversifier l’économie de son pays, qui dépend à 70 % de la vente de son pétrole. Bien que cet or noir soit la source de l’immense fortune de ses dirigeants, le prince sait que cette énergie ne maintiendra pas le royaume à flots pour l’avenir. Son ambition est donc de sortir l’Arabie saoudite de son archaïsme. Il est critiqué par bien des aspects, n’oublions pas que ce pays du golfe fait parti de ceux où l’on applique la loi de la charia. Un radicalisme religieux violent qui soumet les femmes et toutes dérives sectaires, l’homosexualité est toujours punie de peine de mort.
Cependant c’est là que MBS mène un double jeu. Car d’un autre côté part, il a fait de nouvelles concessions pour les femmes : elles peuvent conduire depuis peu et voter si elles possèdent un diplôme universitaire. La population du pays étant majoritairement jeune, le prince permet l’organisation de grands concerts de stars internationales comme Justin Bieber l’a fait à l’occasion d’un festival. La création de festivals de musique, de musées, d’un grand prix de F1 avec une écurie à l’effigie du pays. Certaines choses pourtant interdites si l’on suit la lecture radicale du Coran.
Cependant tous ces projets permettent d’attirer les investissements étrangers, le tourisme et l’image du pays. Le prince a saisi le pouvoir du “soft power”, la marque des vieux pays riches d’occident. Dans le journal Challenges, un expatrié confie son sentiment sur la capitale Riyad : “On y trouve plus de cocaïne, d’alcool et de putes qu’en Californie du Sud”. Quoi qu’il en soit, cette tendance à diversifier son économie peut être retrouvée dans d’autres pays du golfe : Abu Dabi avec la culture, le Qatar avec le sport ou encore Dubai avec le tourisme de luxe. MBS reste cependant le plus disruptif, ambitieux et visionnaire. Pour l’instant il jouit toujours du pouvoir de son pétrole, pour entretenir des relations édifiantes avec les puissances américaines et européennes qui lui font les yeux doux.
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